Voltaire contre Chomsky edit

20 janvier 2023

Pendant des années il était difficile de discuter avec les Chomsky de ce monde, ceux qui récusent les médias « mainstream » et se méfient des visées impérialistes de l’Occident. Les petits surtout, ceux que sur les réseaux sociaux on nomme les « trolls ». Ils s’appuyaient sur un triple régime de légitimité : un doute plus aiguisé que le vôtre, quelques faits précis et méconnus que, pour cette raison même, il était difficile de contester, et de troublantes équivalences dans les menées des grandes puissances. Argumenter était long, coûteux, et somme toute assez vain. Comme dans la guerre, ils « fixaient » l’interlocuteur, c’est-à-dire l’adversaire. Qui n’en a pas rencontré ?

Ce piège intellectuel et politique était particulièrement visqueux s’agissant de la Russie et de l’Ukraine. À la fois parce que de vieux réflexes étaient en jeu, hérités de la guerre froide, parce que les réseaux sociaux étaient inondés de contenus élaborés par la propagande russe et mis en mouvement par des fermes à trolls, et que les vagues images que nous avions de l’Ukraine pouvaient prêter à confusion, notamment sur les thèmes du nationalisme et de l’extrême droite.

Mais le déclenchement de la guerre en 2022 a modifié profondément les conditions de la conversation. Les faits sont têtus, disait Lénine : seuls quelques acharnés peuvent les retenir ou les nier, et encore ne peuvent-ils le faire que quelques jours, quelques semaines au plus. Surtout, depuis le 24 février, on a assisté à l’essor d’un contre-discours beaucoup plus efficace, bien servi à vrai dire par la rhétorique de guerre extraordinairement maladroite déployée par le Kremlin, qui s’est révélé plus habile au fil des années à semer le doute qu’à propager sa « vérité ».

Ce contre-discours se déploie dans une vaste variété de formats et de médias, mais une figure retient l’attention entre toutes, pour sa puissance corrosive : la parodie, et plus précisément une parodie teintée d’exagération, qui consiste à reprendre et pousser un cran plus loin un argument mis en avant par le Kremlin et repris en chœur par les nigauds et les propagandistes. Ce léger déplacement suffit bien souvent à en faire apparaître l’absurdité.

Twitter a été le lieu par excellence de ces exercices voltairiens. Et quelques auteurs se sont affirmés par leur talent. Parmi ceux-ci, celui qui tient le compte de « Darth Putin » (@DarthPutinKGB) est l’un des plus suivis. La parution d’un livre (How to Tankie[1]) est l’occasion de prendre le temps d’apprécier ce phénomène littéraire et intellectuel qui est l’une des signatures de notre époque.

Le triomphe de Chomsky

Qu’est-ce qu’un « tankie » ? À l’origine, ce sont les staliniens d’Europe, ceux qui ont défendu l’intervention des tanks soviétiques à Budapest et, un peu moins nombreux certes, l’écrasement du printemps de Prague. Cette culture politique n’est pas complètement éteinte, et une partie des orphelins du communisme, après avoir placé ses espoirs dans la citadelle cubaine, a trouvé dans la Russie poutinienne un substitut à l’URSS dans sa méfiance de l’Occident gangrené par le capitalisme.

Mais les tankies d’aujourd’hui ne sont plus seulement des staliniens ou des souverainistes pro-russes. Ceux que vise Darth Putin sont, qu’ils le sachent ou non, des disciples de Noam Chomsky : une vaste frange qui va des gauchistes lettrés du Monde Diplomatique, en France, aux agités du bocal de la complosphère, persuadés que la vérité est ailleurs et qu’on nous la cache. « On » : une nébuleuse de cercles plus ou moins concentriques dont les principaux sont les médias (leurs propriétaires sont des milliardaires !), mais aussi, en fonction des sensibilités politiques et des coins du monde, les juifs en général ou les Rothschild en particulier, George Soros, l’Oncle Sam, le grand capital et l’Occident dans ses différentes variantes : dégénéré, impérialiste, ou les deux.

Chomsky, pour sa part, en a surtout après l’Amérique, mais c’est à lui qu’il revient d’avoir formalisé, dans les années 1980-1990, la méthodologie du doute gauchiste qui irrigue aujourd’hui la complosphère – y compris d’extrême droite et y compris dans sa version ignare. Dénonçant en 1988 la « fabrique du consentement[2] » par les grands médias, s’indignant après 2001 des interventions menées sous l’égide des néoconservateurs en Afghanistan puis en Irak, Chomsky s’est fait l’apôtre d’une forme décentralisée et même atomisée d’information qui répond salutairement, selon lui, aux mensonges et à la propagande des grands organes de presse. Qui veut connaître la vérité (celle qu’on nous cache) s’appuiera donc de préférence sur une multiplicité de témoignages directs et sélectionnera des sources alternatives, simples citoyens ou journalistes indépendants.

L’horizon de cette promotion d’une information décentralisée est une déconstruction du monde que nous représente la grande presse. Il est fascinant ici de voir les égarés de la complosphère reprendre les thèmes du gauchisme intellectuel, dans ses raffinements derridiens, deleuziens, bourdivins ou chomskiens. Les représentations des médias seront dénoncées comme une construction, relevant d’un système de domination, auquel les réseaux sociaux offrent heureusement d’innombrables lieux de résistance et de contre-information (ou, comme on le dit à l’extrême droite, de « réinformation »). Les « mille plateaux », ces espaces de résistance citoyenne inspirés du Larzac que Deleuze appelait de ses vœux, sont désormais sur Twitter, qui est la pointe avancée de la déconstruction des vérités douteuses du capitalisme impérialiste. Comme dans un rêve de Toni Negri, la multitude s’y oppose à l’empire.

Cette déconstruction s’appuie bien souvent sur la mise au jour d’autres « faits », oubliés ou mis sous le boisseau par les médias. C’est ici que les dubitatifs de gauche et de droite rencontrent les propagandistes, qui présentent ces « faits » à leur crédulité. En 2014, un général de l’OTAN a ainsi été capturé au Donbass. Vous n’en avez jamais entendu parler ? Normal. On vous le cache. Kellyanne Conway, conseillère de Trump, a même évoqué devant la presse, en janvier 2017, des «  alternative facts ». La droite populiste marchait ici sans le savoir dans la voie ouverte par Chomsky.

Petit traité de propagande 2.0

Tout cela fait bien les affaires de la Russie. Celle-ci, tout d’abord, peut s’appuyer sur les réflexes acquis depuis des décennies par les critiques de l’Occident colonialiste et impérialiste. Cette logique, Darth Putin l’expose parfaitement dans son livre, qui se présente ainsi : « The book that will teach you how to fight forces of colonialism & imperialism ». Se donnant comme un manuel à l’usage des résistants à l’empire américain, il met à nu avec une fausse naïveté toutes les ficelles de la propagande. L’impérialisme ? C’est l’Amérique, voyons. Une intervention illégitime ? Ah ! Parlons-en, justement : what about Iraq ?

La propagande russe s’est déployée avant 2022 avec une certaine logique : pour faire court, les « fascistes de Kiev », qui bombardaient leurs propres concitoyens, étaient les héritiers directs des nationalistes ukrainiens dont une partie s’était alliée aux Nazis lors de la Deuxième Guerre mondiale. Le régime était donc illégitime, agressif, dangereux et corrompu. En outre il n’était qu’une marionnette aux mains de l’OTAN. Et la révolution du Maidan n’était qu’un putsch orchestré par la CIA.

Culminant avec le fameux article de Vladimir Poutine sur les deux peuples qui n’en font qu’un, en 2021, un deuxième front de propagande s’est déployé, sur le thème du monde russe. Pour faire court, ici encore, le pays appelé Ukraine n’était qu’une construction artificielle ; le peuple ukrainien n’avait aucune consistance culturelle ou civile ; le changement de régime visé par l’« opération militaire spéciale » relevait donc au fond d’une opération de police.

Cette intervention, en amont de la guerre et dans ses premières semaines, a cherché ses justifications dans une série de motifs dont un observateur attentif peut noter qu’ils étaient empruntés au répertoire de justifications de l’Amérique depuis les années 1990 : un « génocide » allait être perpétré (comme au Kosovo, donc) ; des armes de destruction massive (biologiques ou nucléaires, selon les versions) étaient en cours de fabrication (comme en Irak, donc) ; des dirigeants illégitimes s’étant accaparé le pouvoir et brutalisant leur propre peuple (comme en Irak et en Syrie), il était légitime d’intervenir, dans la logique du droit d’ingérence mobilisé en Bosnie (1994-1995) ou au Kosovo (1999). L’habileté de cet arsenal d’arguments était frappante, même si peu d’observateurs ont relevé le caractère systématique du parallélisme. Même le thème de l’intervention humanitaire est apparu. Et pour faire bonne mesure, les Russes ont accusé les Ukrainiens de déployer des « boucliers humains » (comme à Belgrade en 1999). Les anti-impérialistes chomskiens de service sur les réseaux sociaux ne s’y sont pas trompés : ils ont repris et diffusé tous ces motifs.

Mais la machine de propagande s’est vite affolée. La résistance inattendue des Ukrainiens unis autour de leur président a eu comme conséquence une perturbation des discours russes : les buts de guerre n’ont cessé de varier, les motifs invoqués sont partis en roue libre, la dénonciation du génocide a fait place à des appels au génocide sur les plateaux de Rossiya 1, la dénonciation des bombardements a fait place à des bombardements bien supérieurs y compris sur des villes russophones, l’intervention humanitaire a cédé la place à des appels aux meurtres, le « monde russe » s’est mis à voler des frigos, la dénazification s’est commuée en défense des valeurs traditionnelles face à l’Occident sataniste et homosexuel…

Comprenne qui pourra. Mais l’atomisation des réseaux sociaux, la brièveté des formats et la variété des acteurs permettent de faire vivre tous ces arguments simultanément. Comme le note Darth Putin dans son livre, « Logic is an imperialist construct ».

Le défi de la langue de caoutchouc

De fait, si l’absurdité et les retournements incessants de la propagande russe ou de la chambre d’écho qu’en donnent les réseaux sociaux peuvent étonner quand on les observe à froid et qu’on tente de les reconstituer, ils ont aussi une forme d’efficacité. Dans son dérèglement même, la propagande se met au diapason des mille et un arguments énoncés sur les « mille plateaux » du doute.

Ce régime de discours où l’on se met à dire n’importe quoi, Cornelius Castoriadis l’a décrit en 1978 dans un remarquable article de Libre consacré à Louis Althusser[3], et dans lequel il a inventé le concept de « langue de caoutchouc » pour qualifier les tactiques dilatoires des anciens staliniens qui avaient jadis pratiqué la langue de bois. Castoriadis décrit ainsi « l’industrie stalinienne et néo-stalinienne de la mystification » : « D’abord, la pure et simple dénégation des faits et de leurs implications. Depuis nombre d’années, et dans les pays d’Europe occidentale au moins, elle ne peut plus fonctionner. Althusser lui-même ne l’avait du reste pratiquée qu’incidemment et secondairement. Sa dignité historique vient de sa contribution au perfectionnement du deuxième procédé de cette industrie : la diversion. Vous voulez discuter de la Russie, des partis staliniens, de l’évolution effective du capitalisme ? On vous invite à Lire le Capital. (…) On passe alors à un troisième type de manœuvre, (...) le détournement. Ce qui la caractérise, d’un bout à l’autre, c’est le patchwork et l’usage intensif de la langue de caoutchouc. La démagogie de la pseudo-rigueur est totalement abandonnée. Les idées sont piquées là où on les trouve, sans aucun souci de leurs potentialités, de leurs implications, de leur compatibilité avec ce que l’on prétend maintenir. Des bouts de vérités sont mélangés à des demi-vérités ou à des contre-vérités totales, et insérées dans des mosaïques de «raisonnements» qui les conduisent là où elles n’iraient pas d’elles-mêmes et en font avorter les conclusions. »

Si le monde de Chomsky décrit bien la structure de diffusion de la propagande russe et partage certains de ses thèmes, celui d’Althusser est caractéristique de ses procédés, qui sont aussi ceux des propagandistes d’aujourd’hui et des trolls qui, naïvement ou pas, les relaient. Car sur le champ de bataille que sont devenus les réseaux sociaux, la guerre en Ukraine voit se rencontrer les gauchistes chomskiens, qui cultivent la méfiance et s’obsèdent d’un empire, et les tankies poutinistes ou néostaliniens, qui en défendent un autre. Les deux sphères se rencontrent.

L’arme du rire

Face à cette nouvelle langue de caoutchouc, à la diffraction des arguments, aux multiples pôles de discours qui interviennent au côté de la propagande russe, on pourrait se laisser déborder. Ou égarer.

À cet affolement de l’information, Darth Putin oppose sur Twitter ce mantra devenu culte, qui dans le tourbillon du vrai et du faux offre une boussole : « Do not believe anything until the Kremlin denies it ». (« Ne croyez rien tant que le Kremlin ne l’aura pas démenti. ») Chomsky contre Chomsky, en somme : la logique du doute est poussée à son paroxysme, jusqu’à se retourner contre ceux qui l’ont nourrie.

La parodie offre à Darth Putin et à ses homologues une ressource extraordinaire, car les excès mêmes des propagandistes font qu’il n’y a pas besoin de pousser très loin un argument pour l’amener au point où il devient absurde. Ainsi, après l’effondrement d’un immeuble touché par un missile à Dnipro, qui a provoqué un emballement de la twittosphère pro-russe :

« Russian missiles are so advanced that western systems, which we have destroyed, cannot shoot them down & that is why a western missile system, that didn’t exist cos it was already destroyed, hit [Russian] missile, that cannot be shot down, & fragments landed on a Dnipro apartment block. » (« Les missiles russes sont si avancés que les systèmes occidentaux, que nous avons détruits, ne peuvent pas les abattre & c’est pourquoi un système de missiles occidental, qui n’existait pas car il était déjà détruit, a frappé un missile [russe], qui ne peut pas être abattu, & des fragments ont atterri sur un immeuble de Dnipro. »)

« My trolls are morons » : « mes trolls sont des idiots », fait mine de se plaindre Darth Putin. La formule dit tout : ses trolls, ce sont à la fois les sbires virtuels du vrai Poutine et ceux qui pourraient venir troller son Doppelgänger. En adoptant la persona et le point de vue de Poutine, Darth Putin piège ses contradicteurs potentiels. Dans le même esprit il fait mine de s’impatienter quand la propagande officielle s’empêtre dans la rhétorique d’une guerre qu’en Russie il est interdit de nommer comme telle. Commentant le 16 janvier une dépêche de l’agence TASS qui évoque des prisonniers de guerre, il soupire :

« Russian prisoners of war, you say? Prisoners of....*war*. So it’s actually a war?

I am surrounded by idiocy. »

(« Des prisonniers de guerre russes, dites-vous ? Prisonniers de....*guerre*. Alors en fait c’est une guerre ? / Je suis entouré de crétins. »)

Mais c’est aussi l’assurance souveraine du vrai maître du Kremlin qui est en ligne de mire, avec ce gimmick répété chaque jour, mutatis mutandis, depuis que la résistance ukrainienne a anéanti les espoirs d’une victoire rapide :

« Day 327 of my 3 day war. We lost 20,000 trying capture Soledar which had a population of 10,000.

I remain a master strategist. »

(« 327e jour de ma guerre de trois jours. Nous avons perdu 20 000 hommes en essayant de prendre Soledar qui avait une population de 10 000 habitants. / Je reste un maître stratège. »)

Voltaire, Kundera, et Radio Erevan

Les techniques, tactiques et stratégies de Darth Putin sont typiques de l’âge de Twitter, jusqu’à l’art de la pointe mise en valeur par le double alinéa. Mais l’auteur anonyme qui anime cette marionnette est un authentique écrivain. Il tient la distance, de tweet en tweet, depuis des années. Ses messages ont un étrange pouvoir apaisant : dans ce monde heurté et discordant qu’est Twitter, où les certitudes vacillent et se réaffirment avec brutalité, le redoublement parodique des mensonges poutiniens finit par restaurer un espace de vérité. Rares sont les auteurs, sur ce format très exigeant des 280 caractères, qui savent ainsi remettre le monde à l’endroit. Les lecteurs ne s’y trompent pas : ils sont plus de 500 000 à suivre le compte de Darth Putin, une prouesse pour un compte anonyme.

Le passage au livre et à des formats plus longs lui permet d’explorer d’autres possibles de la parodie sans perdre en intelligence ni en drôlerie. Sous le tac au tac cultivé par un bretteur des réseaux sociaux, on découvre alors une veine plus riche et plus profonde.

On pense inévitablement à Voltaire. Il y a du Pangloss dans le Poutine de Darth Putin : un homme qui affirme envers et contre tout que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. I remain a master strategist. Plus largement, ironie et parodie sont maniées comme des armes dans un discours de combat, qui ne laisse rien passer. Darth Putin ferraille contre la bêtise et l’obscurantisme, enfilant leur costume pour mieux se moquer d’eux, et diriger contre eux leur propre venin (Rappelez-vous la charge de Voltaire contre le gazetier Fréron : « L’autre jour au fond d’un vallon / Un serpent piqua Jean Fréron / Que pensez-vous qu’il arriva ? / Ce fut le serpent qui creva »).

Mais la grande culture rencontre aussi, et cela donne à penser que Darth Putin a vécu en URSS, cette forme de résistance discrète par l’humour qui fut le propre de la société soviétique, bien au-delà des cercles dissidents. Son tour d’esprit évoque parfois furieusement les blagues de « Radio Erevan », qui faisaient fureur dans les années 1970-1980 en URSS : « Ici Radio Erevan. Un de nos auditeurs demande : Est-ce que l’on peut faire dix ans de prison pour avoir dit que Brejnev est un idiot ? Nous avons répondu : En principe, oui, parce que c’est un secret d’État[4]. »

Quand il écrit, à l’usage des apprentis tankies, « The past changes very quickly. So quickly that sometimes we cannot predict what happened yesterday (ch. 12) », on peut penser aux analyses d’Andreï Gratchev[5], mais c’était aussi une blague soviétique : « L’avenir est certain, seul le passé est imprévisible ». Au-delà de cette tradition de la résistance facétieuse et de la parodie, on tombe aussi sur Kundera et sur l’ironie comme résistance à la récriture de l’histoire[6], cette pratique soviétique dénoncée déjà par Orwell, qu’on aurait pu croire oubliée, et qui est revenue en force dans la Russie poutinienne.

L’ironie et la culture contre l’idiotie d’un régime acharné à récrire l’histoire : c’était un des enjeux de la dissidence et des résistances, en URSS et dans les démocraties populaires. L’ironie du sort (restons dans le ton soviétique), c’est que cette culture de retournement de la propagande vient à présent au secours de notre espace public, malmené par l’alliance entre la carpe chomskienne et le lapin poutiniste.

Une version anglaise de cet article a été publiée par le Green European Journal, sous le titre « Narratives meet reality ». Une traduction espagnole est parue dans le numéro de mars de Letras Libres (Mexico / Madrid) ainsi que sur le site du magazine.

[1]. Darth Putin KGB, How to Tankie: The Anti-Imperialist’s Guide to the Modern Word, publication indépendante, 2022, en vente sur Amazon.

[2] Edward S. Herman et Noam Chomsky, Manufacturing Consent: The Political Economy of the Mass Media, Pantheon, 1988.

[3]. Cornelius Castoriadis, « Les crises d’Althusser. De la langue de bois à la langue de caoutchouc », Libre, n° 4, 1978, p. 239-254. (On peut trouver ce texte ici.) 

[4]. Sur l’humour russe et soviétique, Florent Parmentier me signale le travail d’Amandine Regamey tiré de sa thèse, Prolétaires de tous pays, excusez-moi ! Dérision et politique dans le monde soviétique, Buchet-Chastel, 2007.

[5]. Andreï Gratchev, Le passé de la Russie est imprévisible, trad. fr. Galia Ackerman et Pierre Lorrain, Alma Éditeur, 2014.

[6]. Par exemple le premier chapitre du Livre du rire et de l’oubli (trad. fr. François Kerel, Gallimard, 1979), son premier ouvrage écrit en France.