Les Américains et la politique extérieure de Donald Trump edit

7 juillet 2025

Donald Trump a pris un risque important avec son opinion publique en engageant directement les États-Unis dans le conflit avec l’Iran (tableau 1). Seul un gros tiers des Américains soutient les récentes frappes de leur pays contre l’Iran et la majorité d’entre eux sont favorables à la cessation immédiate de l’engagement des États-Unis dans le conflit avec l’Iran, un tiers seulement estimant que ces frappes rendront l’Amérique plus sûre.

Tableau 1. Les Américains et l’engagement américain dans le conflit avec l’Iran (%)

IPSOS/Reuter ; 21-23 avril ; 1139 personnes.

Plus généralement, les Américains sont hostiles (69%) à tout engagement militaire de leur pays au Moyen-Orient sauf menace directe contre les États-Unis. Outre l’opposition de l’écrasante majorité des électeurs démocrates, les électeurs indépendants sont majoritairement critiques à l’égard de l’engagement américain. Plus grave encore pour Donald Trump, l’électorat républicain est profondément divisé sur ces questions. Si 71% d’entre eux soutiennent les frappes 42% contre 40% souhaitent néanmoins la cessation immédiate de l’engagement américain.

Tableau 1 bis. Les Américains et l’engagement au Moyen-Orient (%)

IPSOS/Reuter ; 21-23 avril ; 1139 personnes.

On comprend dans ces conditions la féroce bataille de la communication qui s’est livrée à propos des résultats de ces frappes. Le sondage IPSOS a été administré le jour même et les deux jours suivants les frappes et il faudra voir comment évolueront les attitudes des Américains sur ces questions à la suite de cette bataille. On comprend aussi que Trump n’ait accordé à Netanyahu qu’une seule série de frappes et lui ait imposé immédiatement après un cessez-le-feu avec l’Iran. La division au sein même du premier cercle trumpiste l’explique également, de même et surtout que l’ancienne promesse électorale du futur président de ne plus engager l’armée américaine sur des théâtres extérieurs. On peut donc penser que Trump hésitera à réintervenir militairement au Moyen-Orient dans un proche avenir et qu’il tentera de maintenir le cessez-le-feu en vigueur le plus longtemps possible.

Tableau 2. Les Américains et la politique extérieure de Donald Trump (%)

IPSOS/Reuter ; 21-23 juin ; 1139 personnes.

Les Américains sont critiques à l’égard de la politique extérieure de Donald Trump (tableau 2). À peine plus d’un tiers l’approuve et seulement les trois-quarts de son propre électorat. Qu’il s’agisse plus particulièrement de la Russie, de l’Ukraine, de l’Iran ou d’Israël les proportions sont les mêmes. S’agissant de l’Ukraine, une majorité se dit en désaccord avec l’opinion suivante : « les problèmes de l’Ukraine ne sont pas notre affaire et nous n’avons pas à intervenir ». Plus grave encore pour le président américain son électorat se divise presque par moitié sur cette question, 45% exprimant leur désaccord. Trump aura donc des difficultés à lâcher complètement l’Ukraine, ce qui est probablement son souhait. D’autant que s’il existe un point de désaccord particulièrement profond entre Trump et les Américains, c’est précisément l’attitude à l’égard de la Russie et de Poutine (tableau 3).  

Tableau 3. La confiance des Américains dans la Russie, Poutine et Zelensky (%) *

Pew Research Center ; 25 pays de l’OTAN, Janvier/Avril 2025 ; 32000 personnes

Les Américains se défient dans leur immense majorité de la Russie et de Poutine, comme d’ailleurs les populations des autres pays membres de l’OTAN. Il n’y a pas ici d’exception américaine. Les Américains ont même légèrement plus confiance dans le président ukrainien Volodymyr Zelensky que la moyenne de cet ensemble de pays. Par ailleurs, un sondage de Quinnipiac (5/9 juin, 1265 personnes) montre que 62% contre 29% des Américains pensent que les troupes américaines devraient être engagées si la Russie envahissait l’un des pays de l’OTAN, dont une majorité des électeurs républicains (54%).

Ces données montrent le fossé existant entre Trump et l’opinion publique américaine sur l’OTAN. L’attachement des Américains à cette organisation tranche clairement avec son propre rejet. C’est ce que montre également l’étude du Pew Research Center sur les attitudes à l’égard de l’OTAN dans 25 des pays membres de cette organisation (tableau 4).

Tableau 4. Évolution de l’opinion des Américains sur l’OTAN entre 2009 et 2025 (%)

Pew Research Center ; 25 pays, janvier/avril 2025 ; 32000 personnes

Ici encore, l’opinion publique américaine ne se distingue pas sensiblement de la moyenne des opinions publiques des autres pays membres. Ainsi, 66% contre 30% de l’ensemble ont une opinion favorable de l’OTAN ces proportions étant de 60% contre 37% chez les Américains.

On constate en outre que dans la population américaine les opinions positives à l’égard de l’OTAN ont augmenté entre 2009 et 2025. Cette augmentation est surtout due à l’évolution importante de l’électorat démocrate (plus 17 points entre ces deux dates). L’électorat républicain, quant à lui, est divisé. On comprend que dans ces conditions Trump n’ait pas adopté une attitude agressive au récent sommet de l’organisation et l’on peut penser que le secrétaire de l’OTAN, Mark Rutte aurait, de toutes manières, pu obtenir de lui ce que les pays membres souhaitaient, et même peut-être plus, sans se mettre à plat-ventre devant sa majesté ! L’OTAN est encore loin de disparaître.