Après DSK edit

16 mai 2011

Quelles que soient les suites judiciaires de l’inculpation pour agression sexuelle de Dominique Strauss-Kahn aux Etats-Unis, il fait peu de doutes que cette triste affaire, à tous les sens du terme, mettra un terme à sa carrière politique. Il s’agit, sans même envisager ici la portée internationale de cet événement, d’un véritable tsunami politique dans la vie politique française. Elle entraîne une complète redistribution des cartes dans la perspective de la prochaine élection présidentielle.

A gauche, le Parti socialiste qui, de manière générale, pourrait voir son image pâtir de cet événement, voit les données de sa primaire bouleversées. Martine Aubry, quelle que soit l’intensité de son désir de concourir à l’élection présidentielle, sera très probablement poussée à se présenter. Face à elle François Hollande et Ségolène Royal voient leur espace politique s’élargir. En outre, certains candidats potentiels qui hésitaient à se présenter seront maintenant tentés de le faire, tels Manuel Valls ou Pierre Moscovici. Le résultat de la primaire devient dès lors véritablement incertain.

Néanmoins, les socialistes devraient être soulagés d’avoir adopté la procédure des primaires que de nombreux cadres dirigeants du parti, il y a peu de temps encore, critiquaient imprudemment, plaidant pour une primaire de « confirmation ». En effet, DSK ne laisse pas un champ de ruines derrière lui puisque le parti peut, grâce à l’adoption de cette procédure, disposer de plusieurs candidats déjà présents, respecter son calendrier électoral et organiser de manière démocratique la concurrence interne pour la désignation de son candidat. L’étape des primaires permettra aux sympathisants socialistes de départager les différents candidats et, il faut l’espérer, de désigner celui qui est le plus capable d’accéder au second tour de scrutin, ce qui ne va pas de soi dans la nouvelle donne politique.

A droite, l’absence de DSK lors de l’échéance de 2012 est à la fois une bonne et une mauvaise nouvelle pour le président Sarkozy. Une bonne nouvelle car la qualification d’un socialiste pour le second tour paraît moins assurée. Une mauvaise nouvelle car cette absence dégage une partie de l’espace électoral pour le centre et peut du même coup encourager Jean-Louis Borloo à sauter le pas de la candidature, rendant alors incertaine la qualification du président sortant pour le second tour.

Autant dire qu’au moment où va s’ouvrir la campagne présidentielle, nul ne peut prédire ni les résultats de la primaire socialiste, ni ceux du premier tour de l’élection présidentielle ni ceux du second tour. Tout est ouvert. La gauche socialiste doit prouver qu’elle est capable sans son homme providentiel de gagner cette bataille décisive et la droite doit surmonter la dynamique d’éclatement qui la menace et les conséquences électorales possible de cet éclatement.

Tout ceci fait d’abord les choux gras de Marine Le Pen dont le discours anti-élites peut s’alimenter à cette malheureuse affaire. A droite comme à gauche, il faut avoir bien en tête que la qualification de la dirigeante du Front national a une forte probabilité.

Le système de partis français se trouve pour la première fois depuis longtemps soumis à une pression qui pourrait provoquer son éclatement. La domination de deux grands partis, le PS et l’UMP, sur la scène politique est remise en question. A droite, l’UMP a été incapable de réunir de manière solide la droite d’origine gaulliste, les libéraux et le centre. A gauche, après le choc Strauss-Kahn, une défaite à l’élection présidentielle pourrait fragiliser dangereusement le Parti socialiste. Enfin, l’installation probablement durable du FN dans le paysage politique pourrait créer des tensions fortes au sein de l’UMP en cas de défaite. De même, au sein du Parti socialiste, une nouvelle défaite pourrait réactiver le clivage entre la gauche et la droite du parti, les anti-mondialistes et les réformistes et même remettre en cause l’unité du parti.

Ainsi, la prochaine échéance électorale est cruciale pour les deux grands partis et leur avenir est incertain. Dans cette situation très mouvante, il est difficile de faire des pronostics mais il est possible d’affirmer que la prochaine élection présidentielle s’annonce comme l’une des plus décisives dans l’histoire de la Ve république.

Enfin, il faut espérer que l’affaire DSK n’augmente pas encore davantage la distance entre le monde politique et les Français, accroissant le pessimisme ambiant et poussant les électeurs à s’abstenir en grand nombre aux prochaines élections. Une sale affaire décidément !